Composition pour la pointe du Dourven avec Perrine Villemur – projet en cours
La musique électroacoustique, que je pratique, a la particularité de tendre l’écoute sur des phénomènes sonores, des types et des morphologies de son. Elle se déploie sur des haut-parleurs et parfois convoque des instrumentistes pour devenir musique mixte. Quelque chose de singulier se niche alors dans le creux de l’oreille des auditeurs et des auditrices : une musique. Je ne suis pas créatrice sonore, je suis habituellement compositrice de pièces écoutées dans des concerts. Et documentariste pour France Culture.



Mais voilà que j’étais en train d’écrire un texte pour la Revue Latitude mer sur l’écoute d’une vague, sur ce qu’il se passait pour l’oreille à l’écoute de se bruit blanc, sur la manière dont notre cerveau et nos neurones réagissaient à ce bruit à la fois si commun et si singulier… et je suis entrée dans la galerie du Dourven. Amusée. Très amusée.
J’avais l’impression d’entrer dans mon texte, dont mon oreille, dans l’écoute, dans le pavillon cartilagineux de l’oreille. Comme bien des galeries, personne ne semblait avoir fait attention à l’acoustique. De sorte que le son ambiant, désordonné, maladroit, masquait bien des fréquences et s’embrouillait en lui-même. Jusqu’à s’amplifier dans la salle principale et enfin, dans le petit renfoncement en biais, se clarifier. Les relations entre mon texte et le lieu m’ont paru si évidentes. Et à travers elle, la question de l’écoute, de l’oreille et de son fonctionnement à l’épreuve de l’écoute d’une vague. D’une simple vague qui irait se nicher dans le creux de notre pavillon, puis dans l’oreille interne et enfin notre cerveau. Cela est aussi simple qu’un coquillage que l’on pose à son oreille. Un Nautile nacré par exemple. Cela est aussi complexe que l’acoustique et la psycho-acoustique, des aspects art-sciences qui j’affectionne particulièrement.
Depuis le texte lu, écouté sous casque face à l’océan dans la verrière du Dourven, va s’échapper une musique qui va se lover dans le creux de la Galerie. Si elle sera une nappe, extrêmement chargée d’harmoniques dans la verrière, elle va se composer, se décomposer peu à peu pour dévoiler un chant qui la composait dès le début mais qui était masqué dans la masse sonore du flux. Cette musique sera spatialisée sur huit haut-parleurs qui vont se répondre en volute dans l’espace.
Partant de cette proposition musicale, Perrine Villemur décline une scénographie simple, élégante, faite de nacre, d’huitre et de cillés. Florian Gazagne produira des sons qui seront une partie des sons utilisés pour la composition.
Partie 1 : Dans le coude de l’’extension vitrée / Ceci est un texte lu face à l’océan / Sous casque
Nous allons décliner le texte publié pour Latitude mer dans une création radio.
Dans l’idée de le donner à lire et à entendre dans une première partie de l’espace. Face à l’océan. De monter par la présence d’un Nautile, par la présence de schéma ou dessins, le soutènement scientifiques du texte, la beauté de la connaissance. Un expérience directe au creux de l’oreille.
Partie 2 : Dans l’extension vitrée / L’oreille externe puis moyenne / Haut-parleur 1 et 2
Présence de coquillages d’huitres sur le sol, nos pas font du bruit en passant. Un son/musique qui semble vouloir se déplacer vers l’intérieur de la galerie (son spatialisé sur les HP). Des ciliés en voilage nacré (moiré) que l’on doit traverser.
Partie 3 : Entrée dans la pièce principale / L’oreille interne / Haut-parleur 4 et 5
Les ciliées filtrent le son, il devient musical. Nous sommes dans l’oreille. Il fait noir.
Partie 4 : Cellule Ile / Cellule océan / Haut-parleur 6 et 7
C’est ici (dans notre cerveau, par les neurones) que le traitement du signal sonore est mémorisé. Il va ensuite entrer dans le creux de l’oreille : notre Hippocampe. Les cellules sont signifiées par un jeux de lumières et/ou de signes phosphorescents et par la musique faite de flux et d’objets fixes. Une voix peut-être imaginée.
Partie 5 : L’hippocampe / Haut-parleur 8
Objet nacré, flottant. Très élégant. Il est aussi la résolution : ceci est une voix, un chant ancien que l’on entait de manière déconstruite ou bruitée depuis le début. C’est elle qui est lovée dans le creux.