Dès qu’on a franchi les premiers énoncés des deux approches : celle de l’art musical et celle des sciences qui touchent à la musique (acoustique, physiologie, psychologie expérimentale, électronique, cybernétique, etc.), on découvre un problème de pure méthode, de définition des objets de la pensée, d’élucidation des processus de réflexion, qui est proprement philosophique. Trouve-t-on dans la philosophie la solution, le terme ou le moyen d’une pensée redevenue efficace ? Ce serait sans doute préjuger autant que médire de la philosophie que d’espérer y trouver si vite une issue à nos incertitudes. Ce qu’on eut lui demander, c’est de les situer, et, en particulier, de désarmer le piège des mots. Mieux avertis par une telle réflexion et surtout mieux situés parmi l’ensemble des démarches qui ont posé à la philosophie le même genre de questions, il semble possible de définir une recherche qui vise, cette fois essentiellement, le musical. Est-ce là proposer une nouvelle discipline, qui se substituerait ou se rajouterait aux précédentes ? Il est sans doute trop tôt pour le dire et pour opter entre deux attitudes également présomptueuses. Remarquons à tout le moins qu’un vide existe entre l’acoustique et la musique proprement dite, et qu’il faut le remplir par une science décrivant les sons, jointe à un art de les entendre et que cette discipline hybride fonde évidemment la musique des œuvres. Pierre Schaeffer, traité des objets musicaux, p. 30, 31.